Une lecture poignante, que j’ai beaucoup apprécié mais dont on ne ressort pas indemne.
L’auteur a choisi de raconter sa mère, une entreprise difficile puisque celle-ci vient de se suicider après une vie compliquée par une fragilité psychologique
parfois proche de la folie.
Avec ce livre on fait le plein d’émotions familiales ; Lucile est issue d’une famille de 9 enfants ou il est difficile de faire sa place, à la recherche de
l’amour paternel et maternel. Devenue femme, puis divorcée, elle tente d’élever seule ses deux fillettes mais rapidement la tâche devient trop lourde et elle perd pied.
L’auteur alterne les chapitres ou elle évoque la vie de sa mère à la troisième personne, et ceux ou elle explique ses recherches pour essayer de comprendre d’où
vient la fragilité de sa mère, ses échanges avec sa famille qui lui apportent une autre vision de Lucille par leurs souvenirs des moments vécus avec elle, ses doutes sur la valeur de
son récit.
Ecrire sur sa mère, c’est lui faire un cercueil de papier, dit elle, lui rendre un hommage, mais c’est également devenu un besoin.
« Un matin je me suis levée et j’ai pensé qu’il fallait que j’écrive, dussé-je m’attacher à une chaise, et que je continue à chercher, même dans la certitude
de ne jamais trouver de réponse. Le livre ne serait rien d’autre que ça, le récit de cette quête, contiendrait en lui-même sa propre genèse, ses errances narratives, ses tentatives inachevées.
Mais il serait cet élan, de moi vers elle, hésitant et inabouti. »
Comment faire son deuil, enterrer les souvenirs et les blessures, accepter le passé pour se tourner vers l’avenir .Dans ce récit Delphine de Vigan m’a touchée
par la sincérité de sa recherche, elle exprime tous les regrets, les manques qui font suite à la disparition d’un être cher mais qui peuvent s’atténuer par une dernière communication dans
l’écriture ou dans la pensée.
Dans le récit de la vie de Lucile, le lecteur prend conscience de l’étroite limite entre les capacités d’absorber les difficultés de la vie et la chute dans ce
qu’on appelle la folie, un constat lourd de conséquence pour soi et pour sa famille, qui m’a fortement questionné.
« Ainsi après dix années de marécage, Lucile revint de loin, revint de tout, laissa derrière elle ses heures parmi les ombres. Lucile, qui n’avait jamais pu
monter à la corde, se hissa hors des profondeurs, sans que l’on sût véritablement comment, en vertu de quel élan, de quelle énergie, de quel ultime instinct de survie. »
d'autres avis sur ce livre:
l'avis de philisine ici
celui de Lystig ici